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Télésurveillance et droit commun

Télésurveillance et droit commun : critères de remboursement, forfaits, TVA équitable et autres éléments clés

La télésurveillance est inscrite dans le droit commun depuis le 1er juillet 2023. Dans la prise en charge de maladies chroniques, elle est désormais intégrée dans la grille de remboursement de l’Assurance maladie. Une évolution de l’offre de soins qui fait de la France le premier pays de l’Union européenne à donner accès au remboursement (hors expérimentation) du suivi médical à distance. Comment s’effectue la transition de l’expérimentation au droit commun ? Comment les entreprises du numérique se positionnent-elles ?

En France, la rupture dans la qualité et la continuité des soins, l’augmentation des pertes de chance des patients, la crise de la démographie médicale et la problématique des déserts médicaux fait couler beaucoup d’encre. Encore plus en cette période estivale alors que les pénuries de médecins se creusent, notamment du fait des effets de la loi RIST sur le plafonnement de la rémunération des intérimaires et d’une crise des vocations qui ne prend pas de vacances.

C’est dans ce contexte de tension hospitalière que les décrets actant « l’intégration de la télésurveillance médicale dans le droit commun » sont entrés en application, au 1er juillet 2023 pour les opérateurs. Et au 1er août pour les entreprises à qui un mois supplémentaire a été accordé suite à la publication tardive des référentiels.

Ces textes ont été votés dans le cadre de l’article 36 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022, et publiés au Journal officiel le 31 décembre 2022. Le 1er juillet 2023 marquait également la date de clôture de l’expérimentation ETAPES[1]. Mis en place en 2018, ce projet est venu financer le déploiement à l’échelle du pays de plus d’une centaine de projets numériques en télésurveillance. Au total, 130 000 patients ont pu en bénéficier.

 

Le nouveau cadre législatif prévoit :

  • L’encadrement du suivi médical à distance mené par l’équipe soignante, c’est-à-dire la déclaration des consultations réalisées en télésurveillance auprès des Agences régionales de Santé – premier décret

 

  • L’encadrement du déploiement du dispositif médical numérique, soit les modalités d’évaluation et d’inscription au remboursement de la télésurveillance – second décret

Deux décrets par la suite complétés par l’arrêté du 16 mai 2023 et les arrêtés du 22 juin 2023[2] venant cadrer les rémunérations des équipes soignantes dans ce nouvel environnement de travail, ainsi que le financement des solutions numériques. Comme le rappelle la HAS, l’enjeu du remboursement est de « garantir un niveau de rémunération pérenne aux exploitants ». D’un point de vue de santé publique et d’économie, le gouvernement entend entériner cette pratique et généraliser son déploiement comme levier important de lutte contre les déserts médicaux.

Télésurveillance et droit commun : coordonner les parcours de soins, réduire les hospitalisations et diminuer les DMS

Ces process et textes de loi concernent les solutions dont le bénéfice clinique ou l’amélioration de l’organisation des soins sont avérés. En effet, les principaux objectifs de l’intégration de la télésurveillance dans le droit commun, et du remboursement des dispositifs médicaux numériques (DMN), consiste à : « renforcer le suivi des patients grâce à une prise en charge médicale à distance interactive, coordonnée et personnalisée au plus près du lieu de vie, mais aussi à prévenir les complications – notamment en limitant le risque d’hospitalisation –  et donc d’améliorer le confort de vie », relaie la Haute autorité de Santé (HAS). Dans le détail, dans les colonnes du journal Le Monde du 1er juillet, le Pr Rémy Sabatier, cardiologue au CHU de Caen (Normandie) précisait que « la télésurveillance [a] réduit de 56 % les réhospitalisations pour insuffisance cardiaque ».

Grâce à la télésurveillance accessible non plus dans le cadre exclusif des expérimentations, mais en routine dans la prise en charge de cinq maladies chroniques (insuffisance rénale, respiratoire, cardiaque, port d’une prothèse cardiaque, diabète), les soignants restent informés de l’évolution des symptômes de leur patient à distance, et sont en mesure d’adapter les protocoles thérapeutiques. Les parcours de soins sont par ailleurs restructurés, optimisés, fluidifiés. À noter que le remboursement dans le cadre du suivi post-opératoire pourrait se concrétiser, et ainsi favoriser la diminution des durées moyennes de séjour (DMS).

Guichet ANS, portail G_NIUS, HAS

Afin de bénéficier du remboursement d’un DMN, les solutions de télésurveillance doivent être validées par la CNEDiMTS, commission interne à la HAS chargée de vérifier que les critères et bénéfices avancés par l’industriel sont confirmés. Pour accéder au remboursement, ces solutions doivent répondre à « des obligations de sécurité et d’interopérabilité prévues par l’agence du numérique en santé (ANS) ». Ces mêmes dispositifs doivent dans le même temps obtenir « un certificat de conformité au référentiel en vigueur ». Enfin, les opérateurs (praticiens, PDS ou personnel médical impliqué dans la télésurveillance) doivent se déclarer une fois par an auprès de leur ARS afin de bénéficier du remboursement.

Télésurveillance et droit commun

Pour faire la demande d’un remboursement pour un DMN précis, les acteurs de la télésurveillance bénéficient de différentes solutions d’accompagnement :

  • Depuis août 2022, le guichet de l’ANS permet aux entreprises d’anticiper leurs démarches et de constituer les dossiers d’inscription

 

  • Le portail G-NIUS donne des clés de compréhension sur l’écosystème, les financements disponibles et la réglementation en vigueur. Un simulateur en ligne permet aussi à l’entreprise de savoir si elle éligible au remboursement de la télésurveillance

 

  • Une organisation ad hoc proposée par la HAS[3] pour aider à la complétion des dossiers visant l’évaluation des DMN. Des dossiers ensuite saisis sur une plateforme dédiée, construite en deux onglets : rendez-vous de pré-dépôt ou rencontres précoces.

Télésurveillance et droit commun : l’application de forfaits dans la mise en place du remboursement

Dans la mise en œuvre du remboursement, les pouvoirs publics ont prévu deux forfaits. Le premier, le forfait opérateur rémunère le médecin utilisant une solution de télésurveillance médicale, à hauteur de 11 euros par patient (niveau 1) et 28 euros pour le suivi de patients atteints d’une insuffisance cardiaque, rénale, respiratoire ou d’un diabète (niveau 2). Le second forfait, lui, est prévu pour rémunérer les fabricants des dispositifs de télésurveillance. Dans le détail, « le mode de tarification forfaitaire est dite périodique, soit tous les 6 mois, avec une période de transition avec les PCI », déclare Dorothée Camus, responsable accès au marché du SNITEM[4]. L’existence de ces forfaits fait « que l’on ne parle pas de bascule dans le droit commun, mais de changement de droit commun. »

Les enjeux de la TVA réduite

Le 30 mars dernier, un protocole d’accord sur la télésurveillance a été signé entre le ministère de la Santé et de la Prévention, France Biotech et France Digitale. De nombreux engagements y ont été pris après plusieurs mois d’échanges et de mobilisation.

Objectif de ce protocole : définir les engagements réciproques des signataires en vue d’accompagner le développement de la télésurveillance médicale en France.

Une grande question dans l’expérimentation ETAPES a été celle des différentes mécaniques qui ont coexisté en fonction des aires thérapeutiques. En particulier la question de la TVA. En miroir de ce nouveau droit commun, « nous ne sommes pas dans un changement ni dans un rapport de TVA à la baisse, nous sommes dans la création d’un taux à 5,5 % », atteste Dorothée Camus. Concrètement, une TVA à 5,5% est appliquée pour les prothèses cardiaques implantables, 20% dans le cadre de la surveillance respiratoire.

« Nous nous sommes débrouillés pendant le temps expérimental pour que l’on se retrouve avec une grille tarifaire commune à toutes les aires thérapeutiques. Nous avons donc des tarifs TTC communs à toutes les aires, et derrière des régimes de TVA différenciés, ce qui suppose une rémunération des entreprises différentes alors que le ministère considère qu’il s’agit d’un même service médical. D’où la proposition d’harmoniser la TVA et de modifier le code général des impôts pour élargir la TVA technique à la télésurveillance et garantir l’équité de traitement entre les entreprises du numérique »

Un sujet sur lequel se penche actuellement l’administration fiscale. À noter que « ce code général des impôts doit être conforme à la directive européenne modifiée en 2022. »

L. Bourgault – Aurala Communication

Sources

  • Conférence de presse SNITEM, le 30 juin 2023
  • Haute autorité de Santé (HAS). Télésurveillance médicale : 2 décrets actent l’intégration de la télésurveillance médicale dans le droit commun Consulté en juillet 2023. Disponible : https://www.has-sante.fr/jcms/p_3405664/fr/telesurveillance-medicale-2-decrets-actent-l-integration-de-la-telesurveillance-medicale-dans-le-droit-commun
  • Legifrance. Arrêté du 25 juillet 2022 portant approbation du référentiel d’interopérabilité et de sécurité des dispositifs médicaux numériques de télésurveillance. Consulté en juillet 2023. Disponible : https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000046115270

[1] Expérimentation de télémédecine pour l’amélioration des parcours de santé.

[2] Arrêtés prévus dans le cadre de la prise en charge de ces maladies chroniques : l’insuffisance rénale, cardiaque, respiratoire et le diabète.

[3] Information disponibles en écrivant à l’adresse suivante : guichetnumerique@has-sante.fr.

[4] Une cinquantaine d’entreprises adhérentes au SNITEM sont spécialisées en télésurveillance.