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Re'connect

Télésuivi médical : améliorer le parcours de soins des patients en situation de précarité

Fracture numérique et fracture sociale : comment inclure des patients non connectés et/ou en situation de précarité dans un suivi médical à distance ?

Mené à l’Hôpital Henri Mondor AP-HP dans le service d’oncologie du Pr C. Tournigand, le projet Re’connect a pour ambition de rendre le numérique accessible à tous les patients non équipés et propose une solution afin de réduire les inégalités. Pour en apprendre plus, Claude Ganter, patiente partenaire du service d’oncologie médicale et membre à part entière de ce projet, nous partage son retour d’expérience.

Grâce au financement accordé par l’Institut National du Cancer (INCa), le service d’oncologie a mis en place Re’connect dans le cadre d’une étude qui s’adresse aux patients en situation de précarité, qui sont suivis en hôpital de jour pour une chimiothérapie intraveineuse. Le dispositif est simple mais efficace : une tablette ARDOIZ®, équipée en 4G, spécifiquement conçue pour des publics non digitaux, est mise à disposition du patient avec un accès direct à la solution de télésuivi médical Onco’nect, pendant toute la durée des cures.

Dispositif d’annonce et mise en place du suivi médical : le patient face au flot d’informations

Lorsque l’annonce de la maladie et des traitements survient, le patient se trouve dans un temps de sidération, souvent de choc. Si l’impact émotionnel est important pour le patient, il doit en même temps être en mesure de comprendre et de retenir de nombreuses informations cruciales communiquées par le médecin et l’équipe en charge de son parcours de soin.

Au début de sa prise en charge, il peut s’avérer utile et rassurant pour le patient, de savoir que toutes les informations médicales seront disponibles et consultables depuis son domicile, grâce à un outil numérique comme Onco’nect. Au-delà du stockage de documents, l’application permet aussi aux patients de contacter une infirmière rapidement, et simplement, pour toute question ou en cas d’angoisse, via la messagerie sécurisée.

Mais comment en faire bénéficier les patients en situation de précarité voire d’illectronisme ?

L’illectronisme, qui est concerné ?

En France, 17% de la population ne dispose pas d’accès à Internet ou ne sait pas utiliser les outils numériques. Cet illettrisme numérique creuse les inégalités sociales déjà existantes et renforce l’exclusion des personnes fragiles. En effet 16% des ménages les plus modestes y sont confrontés contre 4% des ménages les plus aisés. On note également une inégalité générationnelle puisque 53% des plus de 75 ans n’ont pas d’accès à Internet depuis leur domicile contre seulement 2% chez les 15-29 ans.

Re’connect : inclure des patients en situation de précarité, dans un suivi médical numérique adapté

Que la fracture numérique soit liée à un problème d’équipement, de langage, d’isolement ou tout simplement d’un manque de maîtrise des outils numériques, les patients qui ne pourraient pas utiliser la plateforme Onco’nect en toute autonomie, sont repérés par l’oncologue. Il leur est alors proposé de bénéficier du prêt d’une tablette ARDOIZ®, mise à disposition par le service d’oncologie, avec un accès et un accompagnement à l’utilisation du portail de suivi médical.

« Re’connect, c’est la volonté du service de réduire les inégalités. Ne pas laisser de côté des patients dépourvus d’équipement numérique, afin qu’ils puissent bénéficier d’un soutien adapté pour leur assurer un meilleur suivi »

Claude Ganter, patiente partenaire du service d’oncologie médicale de l’Hôpital Henri Mondor AP-HP

Lorsque le patient est favorable au dispositif Re’connect, il rencontre les infirmières du pôle de soins de support, CALIPSSO, qui réalisent une évaluation selon les critères d’inclusion définis dans le programme. Vient ensuite l’entretien avec l’assistante sociale du pôle pour finaliser l’inclusion au programme et sa mise en place. En effet, Claude Ganter, patiente partenaire du service d’oncologie, nous confie que « le patient est toujours libre d’accepter ou de refuser le dispositif proposé. Il arrive parfois qu’il renonce après avoir dit oui au médecin, à la blouse blanche, de peur de passer pour un « mauvais patient » alors qu’il se sent incapable d’utiliser un outil numérique. Il est toujours libre de revenir sur sa décision, comme de tester l’outil au début de sa cure ».

Un accompagnement humain, au-delà du « simple prêt » de matériel

Une fois configurée, la tablette est remise au patient lors de la première séance de chimiothérapie en hôpital de jour (cure 1). Dans le même temps, un accompagnement de 40 minutes est organisé avec l’attachée de clinique et/ou avec Claude, présentée comme patiente partenaire avec des compétences métiers (digital). Les objectifs de cet entretien sont avant tout de :

  • Aider le patient à prendre en mains la tablette et expliquer les étapes de la navigation
  • Montrer comment répondre aux questionnaires inter-cure (J-3 et J+3)
  • Apprendre à utiliser la messagerie

Mais c’est également un temps important d’échange pour réassurer le patient sur l’objectif de ce programme et les bénéfices d’un suivi inter cure. C’est aussi l’assurer du lien constant avec l’équipe médicale en cas de besoin. Qu’il interagisse ou pas, la relation avec les soignants est renforcée.

« En tant qu’ancienne patiente, je trouve que ce dispositif apporte un vrai complément de confort et de sécurité entre les cures. À l’époque de mes traitements, ce suivi n’existait pas encore. De fait, il m’est arrivé de ne pas appeler le service pour une question, une angoisse passagère… de peur de déranger. La messagerie, par exemple, est un formidable outil pour renforcer la communication avec l’équipe. Pendant la consultation avec l’oncologue, il arrive qu’on oublie de parler de certains effets secondaires. Renseigner le questionnaire donne une traçabilité complète des effets produits par les traitements. »  

Claude Ganter, patiente partenaire du service d’oncologie médicale de l’Hôpital Henri Mondor AP-HP

Pour certains patients, avant même d’aborder le fonctionnement de l’application de suivi, il est nécessaire de les familiariser avec les gestes et les réflexes du digital que 14 millions de Français en situation d’illectronisme ne connaissent pas. « Chaque profil est différent et notre challenge est de trouver des astuces pour que le patient utilise l’application au mieux » témoigne Claude Ganter. Par exemple, une des solutions qui a été mise en place a été de « construire un document très pédagogique avec toutes les étapes : de l’allumage de la tablette au parcours détaillé pour réussir la navigation jusqu’à l’accès aux applications (messagerie, questionnaire …). Nous reprenons ce petit guide point par point avec chaque patient et annotons ensemble ce qui leur semble compliqué. »

Renforcer le lien soignant-soigné et amener l’hôpital au plus près des patients

Au cours du suivi, il peut arriver que certains patients décrochent à cause de la fatigue engendrée par les traitements ou face à des problèmes de langue. En revanche, ce ne sont « pas forcément les plus âgés » nous confie Claude.

Même si les questionnaires ne sont pas toujours complétés, la messagerie a beaucoup de succès. C’est parfois plus facile pour les patients d’envoyer un message pour dire que tout va bien quand ils se rendent compte qu’ils ont oublié de compléter un questionnaire qui n’est plus disponible. Re’connect permet de renforcer la relation soignant-soigné et pallie une fracture sociale qui survient souvent pour les personnes en difficultés avec le numérique. Pour les patients les plus à l’aise avec l’outil, il arrive même qu’ils s’approprient également la tablette pour d’autres usages au-delà de leur suivi médical, en découvrant des applications ludiques pré-installées.

Qu’en disent les patients ? Convaincus de la pertinence de l’outil mis à leur disposition et de l’opportunité d’avoir une tablette, pour eux, « c’est l’hôpital qui arrive chez eux d’une autre manière ».

 

Menée depuis février 2021, cette étude a déjà permis à 20 patients de bénéficier du dispositif médical inclusif Re’connect.

Sources :